Le lundi 14 avril 2025 marquait l’entrée en Semaine Sainte. Ce même jour en la cathédrale Saint-André, le diocèse de Bordeaux célébrait la messe chrismale, aux cotés de son archevêque, Mgr Jean-Paul James.
Il y a quelques années, en pèlerinage avec des jeunes professionnels en Terre Sainte, je suis témoin d’un phénomène étonnant : en quelques jours à peine, le désert aride, ocre de Judée, devient vert et se remplit de fleurs. Puissance de la vie ! Voilà la messe chrismale : nous célébrons la puissance de Vie du Christ, notre Espérance, la puissance de vie des sacrements de l’Église qui nous font recueillir deux beaux fruits : la communion et la fraternité.
Oui, le Christ Jésus fait passer nos vies de l’ocre au vert. Ce jour-là, nous dit l’Évangile « tous avaient les yeux fixés sur lui ». Sans doute, se demandent-ils : « quel commentaire ce jeune rabbi va-t-il donner de ce passage d’Isaïe ? » C’est la surprise : Jésus attire l’attention, non sur ce qu’il lit, mais sur ce qui arrive ; non sur le Livre, mais sur sa Personne. « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture ». Lui Jésus est la Parole de Dieu faite chair. Chers frères jubilaires, repensant à votre parcours, qu’est-ce qui vous a conduit à envisager le ministère ordonné ? Pour moi, c’est clair : le Christ Verbe de Vie, le Christ menant le combat pour la vie, le Christ pascal mort et ressuscité. Dans la synagogue ce jour-là, tout semble bien commencer, et pourtant ça se termine mal : ceux qui l’écoutent à Nazareth veulent le précipiter au bas de la colline. « Mais lui allait son chemin » nous dit saint Luc. Il continue sa mission. IL ne se laisse pas décourager par nos cœurs arides et secs. Il nous espère. Avant d’entrer au séminaire, un chant m’avait marqué : « Lumière pour l’homme aujourd’hui… Touche mes yeux afin qu’ils voient de quel amour tu me poursuis ». Le voilà le Christ, pèlerin d’espérance. Il nous espère, Il nous poursuit de son amour ! Et sans se lasser, Lui le Très Haut, Il appelle chacun de nous, par son nom : c’est vertigineux ! Il appelle André, et Matthieu et Zachée, et Marie-Madeleine. Et si nous le suivons, Il fait passer nos terres ocres en jardins verdoyants. Sa puissance de vie reçue dans les sacrements guérit nos yeux usés, nous libère de nos chaînes et brise nos cœurs de pierre, il remet debout. Plus que cela ! C’est notre expérience de prêtre, de diacre, de personne engagée dans l’Église : nous voyons se déployer la puissance de vie du Seigneur. Peu à peu, Celui-ci façonne des êtres, les sauve, les bénit, leur donne la force, même dans les épreuves les plus dures ! La voilà notre espérance. J’aime le dialogue du Christ avec la samaritaine, parlant de l’eau vive : « Si tu savais le don de Dieu ! » Si tu savais l’amour dont tu es aimé. Si tu savais la puissance de vie dont tu es porteur depuis ton baptême, ta confirmation, ton ordination, ta consécration ! Ces dons irriguent nos terres arides et les font reverdir !
Et cette puissance de vie rend nos personnes, nos communautés, porteuses de deux beaux fruits : la communion dans l’Église, et la fraternité dans l’humanité. Oui, la communion que je vois dans nos assemblées dominicales aux membres si divers en âges et en catégories sociales. Dites-moi quelle association réunit aujourd’hui des gens si divers ? Or cette communion, nous la recevons, en particulier lors de la messe chrismale. Pour le diocèse de Bordeaux, une seule huile des malades, une seule huile des catéchumènes, un seul Saint chrême, un seul presbyterium, un seul Saint-Esprit qui permet aux personnes dans la différence de leurs vocations, de vivre la communion, c’est à dire l’unité et la diversité, unité dans la diversité. Pas l’un sans l’autre. Blaise Pascal écrivait : « l’unité sans le pluralisme devient tyrannie. Le pluralisme sans l’unité devient anarchie ». Je vous remercie, prêtres du diocèse, d’être serviteurs de la communion. C’est une tâche difficile, un combat qui passe parfois par la correction fraternelle vécue dans la confiance les uns à l’égard des autres, et dans la prière ; mais c’est aussi un don reçu dans l’Eucharistie et le sacrement de réconciliation.
Communion dans l’Église et fraternité dans l’humanité, à la suite du Christ Serviteur jusqu’au bout. Merci à vous diacres, unis à vos épouses, d’être les signes du Christ Serviteur et de la diaconie de l’Eglise. « C’est quand elle est auprès des pauvres que l’Église est le plus pleinement catholique, parce que c’est là qu’elle apprend de son Seigneur, toute la grandeur, la largeur et la profondeur de la compassion de Dieu pour notre monde où Il l’envoie » (Cal Aveline). Je suis heureux de nos visites cet après-midi, de lieux où s’exerce cette diaconie : aumôneries des malades, de la prison, café sourire, pain de l’amitié, centre Sainte-Fleur et Saint-Nicolas, café joyeux, halte du Secours catholique, et tant d’autres. Par-là, des vies renaissent, passent de l’ocre au vert.
À vous tous, prêtres, diacres, consacrés, laïcs je dis ma très grande gratitude : mes visites dans les doyennes, les paroisses, les écoles, les services et aumôneries me donnent à voir la Puissance de vie du Christ à l’œuvre par vous. Car pour que Sa Puissance de vie se répande en Gironde, le Christ a besoin de tous, du plus âgé (notre frère ainé de 103 ans !), aux plus jeunes. Quelle joie par exemple, le mercredi des cendres ces jeunes étudiants et professionnels dans nos églises ! J’en vois s’engager à Hiver Solidaire, aux conférences Saint-Vincent-de-Paul, à Marthe et Marie, dans une école, comme membres des maîtrises scoutes et guides ; j’en vois s’engager pour toujours dans la foi chrétienne par leur prochain baptême, ou s’engager dans le mariage (250 couples réunis à la dernière journée des fiancés !), dans la vie religieuse, la prêtrise ou le diaconat. Frères et sœurs, prions pour que nous soutenions ceux qui souhaitent répondre à l’appel du Christ Jésus : Que Sa puissance de vie irrigue notre belle Eglise de Bordeaux, et que notre diocèse garde longtemps sa jeunesse, sa verdeur et sa joie. Amen
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